Poésie (II)

juillet-sept.2014 026
Photo Líria Dora Orlowska © Re/cogito

 

 Canicule

A midi
en juillet
la place est une arène blanche
où seul l’idiot
torée avec son ombre.
Au clocher
douze coups
égrènent un siècle.

*

Vers le soir le vent se lève
et traverse la place en derviche tourneur.
Les femmes courent aux jardins
mater l’émeute des lessives.
On espérait la pluie :
c’est une salve de gros sel dans la poussière.
La terre a son odeur de chien mouillé.

 

 

Eau

Il me plaît qu’un peu d’eau
affleure sur la page

en son lit de voyelles.
Ainsi commencent de se lire
la transparence
et l’élémentaire chimie
qui nous abreuvent.
Ce que le mot consent
à ne pas endiguer
– source et delta –
peut monter à nos lèvres
et la mort elle-même
fait eau de toutes parts.


Michel SIREY

Co-fondateur en 1968, avec Jean-Marie et Danièle Pierson, du cabaret poétique « Le Hareng-Saur » à Metz (où il est né et a vécu jusqu’à l’âge de 21 ans), Michel Sirey se considère d’abord comme un fervent lecteur de poésie en tous temps et en tous lieux, silencieux ou proférant, dans la solitude comme dans la proximité des regards et des souffles suspendus. Ses compagnons de route se nomment Jean Follain, Léon-Paul Fargue, André Hardellet, Jean Tardieu, Jacques Réda ou Maurice Chappaz… Passionné par la vie des oiseaux, il serait tenté, à la suite d’Adrian Miatlev, de déclarer : « Il n’y a pour moi, il n’y a plus pour moi que les bêtes et les poètes et leur poésie à tous deux ».

[XII 2014]